Du cœur à la respiration – EJB
Très pénible réveil, ce matin, comme si le corps refusait de vivre le jour, de quitter l’inconscience lourde ; se jeter hors du lit, se retrouver debout recroquevillé puis s’asperger d’eau froide, dentifrice et café bouillant – coups de fouet de la vie pour se donner et donner l’illusion que tout va bien, que je marche comme les autres et vois. Mais je n’avance pas vraiment et suis aveugle. Seul le corps me donne une apparence de vie. Il écoute et parle, de ses mains, de ses jambes. Et puis, c’est le regard des autres ; curieux, inquisiteurs, diagnostiqueurs. Les gyrophares des camions-poubelles oscillent l’œil. Les bus oranges ont fait le plein de gens dedans, hagards.
Arrive une lettre d’amour impossible pour les autres et un regard passion de jeunes yeux brillant de désir, de bonheur à venir, de projets… et tout repart plus ferme, plus facile. L’écriture se fait plus nerveuse, plus rapide. Il faut la freiner. Dans ses banalités. La vie a repris sur un coup de folie et une gerbe de mots d’amour. Tout peut continuer. Du cœur à la respiration.
Ernest J. Brooms